Le Mozambique vulnérable face à la multiplication des cyclones

Lcm afp
Par Lcm afp , météorologue
Le Mozambique vulnérable face à la multiplication des cyclones
Crédit : Image d'illustration / Adobe Stock
Trois cyclones ont ravagé en trois mois le nord du Mozambique. Cet acharnement climatique sur l'un des territoires les plus démunis de la planète laisse des populations en détresse et interpelle le centre de surveillance cyclonique.

"Le Mozambique vit une véritable série noire d'impacts cycloniques", selon Sébastien Langlade, responsable de la prévision cyclonique au centre météorologique régional spécialisé (CMRS) de La Réunion.

Mi-décembre, Chido a dévasté Mayotte et causé la mort d'au moins 120 personnes au Mozambique. En janvier, Dikeledi a coûté la vie à au moins cinq personnes.

Et la semaine passée, Jude, avec des rafales estimées à 195km/h par les autorités mozambicaines, a frappé à son tour ce pays pauvre d'Afrique australe, avec un bilan de 16 décès, 130 blessés et 40.000 habitations détruites, dans cette saison cyclonique qui s'étire jusque vers avril.

"Les centres de Jude et Dikeledi ont atterri sur la côte du Mozambique quasiment au même endroit, Chido un peu moins de 200 km plus au nord", détaille Sébastien Langlade, dont le CMRS est chargé de la surveillance du sud-ouest de l'océan Indien par l'Organisation météorologique mondiale. "Les mêmes populations ont été affectées par plusieurs cyclones, c'est une double tragédie", explique Naemi Heita, à la tête de la délégation de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à Maputo. Ces événements répétés mettent aussi à l'épreuve la réponse des organisations internationales.

Avec les précédents cyclones et des pluies nourries, "tous les bassins fluviaux et tous les barrages de la province de Nampula étaient déjà quasiment pleins", décrit Guy Taylor. Les seules inondations causées par le cyclone ont touché près de 30.000 personnes selon l'Unosat, une entité des Nations unies évaluant les dégâts grâce à l'analyse de données satellite par l'IA.

"Depuis 2019 huit cyclones ont frappé le Mozambique. C'est sans précédent dans l'histoire du pays", tranche ce météorologue qui, à l'occasion d'une mission, a recensé tous les systèmes ayant touché le territoire depuis le début de l'ère satellitaire en 1969.

"On fluctuait entre six et sept événements, cyclones et tempêtes inclus par décade. On en est déjà à dix en même pas six saisons", observe-t-il sans pouvoir "dire beaucoup plus que le simple constat".

L'eau de mer, plus chaude, favorise les phénomènes cycloniques

Le canal du Mozambique aux "eaux un peu coincées entre Madagascar et l'Afrique et habituellement plus chaudes" est un facteur. Car les mers aux températures plus élevées sont un "carburant énergétique" des cyclones qui demandent toutefois d'autres "ingrédients atmosphériques" pour se développer, explique le prévisionniste. Dans le sud-ouest de l'océan Indien, huit des onze tempêtes tropicales recensées ont atteint le stade de cyclone cette saison. "C'est un ratio supérieur à la normale. Habituellement, il est de 50% et dépasse pour l'instant les 70%", calcule encore Sébastien Langlade.

"Depuis 2010, la tendance est à une conversion un peu à la hausse, plutôt proche de 60%", ajoute-t-il. "Est-ce que c'est simplement une fluctuation naturelle de long terme ou une réponse au réchauffement climatique ? Il est encore trop tôt pour le dire."

Le dernier rapport du GIEC en 2023 décrit comme "probable que la proportion mondiale de cyclones tropicaux majeurs (catégorie 3-5) ait augmenté au cours des quatre dernières décennies".

"Dans un climat plus chaud, la proportion de phénomènes intenses pourrait augmenter de l'ordre de 10-15%" ajoute Sébastien Langlade. "Les systèmes ayant réussi à se développer peuvent devenir clairement hyper violents parce qu'ils auront un carburant océanique démentiel."

Il note des bilans moins dramatiques que dans le passé: en 2019, le cyclone Idai avait été bien plus meurtrier avec plus de 600 morts dans le centre du Mozambique.

"Mais nous ne pouvons pas protéger des enfants et leurs familles sans ressources", prévient-il. Environ 16% du financement de l'Unicef provenait du gouvernement des Etats-Unis avant le retour au pouvoir de Donald Trump, qui a depuis largement coupé les aides internationales.

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